« Le sexisme dans l’espace public », l’étude de Vie Féminine

 

Vie Féminine présentait ce mardi 26 septembre, à Charleroi, les résultats de son étude sur le sexisme dans l’espace public.

Le sexisme est évidemment travaillé régulièrement par Vie Féminine et un ras-le-bol s’est clairement manifesté – « le sexisme y’en a marre ! » –, suivi par une volonté d’action concrète. Un appel à témoignages a dès lors été lancé, de janvier à mars 2017, permettant de recueillir les réponses de 400 femmes de Wallonie et Bruxelles.

Le questionnaire a été diffusé en ligne mais aussi en version papier, grâce à un travail de terrain et de proximité des intervenantes de Vie Féminine. La version papier a ainsi été très prisée dans la région de Charleroi, notamment auprès d’un milieu plus précarisé.

Une majorité de répondantes se situe dans la tranche 18-35 ans.

 

Le sexisme dans l’espace public n’est pas qu’une question d’interactions uniques entre un auteur et une victime. C’est un ensemble de comportements et de stéréotypes s’intégrant dans une société patriarcale où règnent trop souvent les rapports de domination entre les sexes et l’ignorance volontaire du consentement.

Plusieurs femmes se lèvent tour à tour dans l’assemblée pour donner des extraits (parfois très glauques) des témoignages recueillis. On a beau savoir que cela existe, cela fait toujours froid dans le dos.

 

Le premier chiffre dévoilé est sans appel : 98% des femmes interrogées déclarent avoir vécu des situations de sexisme dans l’espace public. Et il ne s’agit pas que d’évènements isolés, que d’une mauvaise expérience que l’on vit par hasard une fois dans une vie, car plus de la moitié d’entre elles considèrent que ces situations sont régulières !

C’est le constat majeur de l’étude, sur lequel il ne faut cesser d’insister : le sexisme est partout, tout le temps et sous toutes les formes. Le phénomène est classé en quatre catégories :

Cette étude, comme on le voit régulièrement sur Internet avec la multiplication de blogs spécifiques, met en lumière le besoin pour les femmes d’avoir un espace où en parler, où partager des expériences parfois très traumatisantes et être entendues. Les répondantes ont d’ailleurs été particulièrement loquaces, n’hésitant pas à déborder les cadres de réponse pour déposer ce qu’elles avaient dans la tête et sur le cœur.

Sexisme en rue ou dans les TEC : 67%.

Comment ces personnes se sont-elles principalement senties après avoir été victimes de ces situations de sexisme ?

Ces chiffres sont particulièrement interpellants dans la mesure où ils traduisent des conséquences à moyen voire à long terme. Il ne s’agit pas seulement d’un inconfort momentané mais de sentiments négatifs permanents qui nuisent au bien-être et peuvent entraîner un repli sur soi et des stratégies d’évitement.

 

74% des répondantes ont déclaré avoir parlé de l’agression vécue à une personne de leur entourage. C’est assez positif mais 26% de personnes qui gardent pour elles une expérience de ce type reste un pourcentage non négligeable. Ensuite, les réactions des personnes à qui ces femmes se sont confiées diffèrent : alors que 73% font preuve d’un soutien et/ou d’une colère partagée, 21% banalisent l’expérience vécue (« ce n’est pas si grave », « c’est passé, tu es vivante, n’y penses plus » et 6% vont jusqu’à une réaction de culpabilisation (« mais tu as vu comme tu étais habillée aussi ? », « tu l’as peut-être regardé d’une certaine façon, il a cru que… »).

Seulement 3% des répondantes sont allées plus loin en portant plainte, utilisant ainsi la loi de 2014 contre le sexisme dans l’espace public. 48% seulement ont déclaré connaître l’existence de cette loi. Selon Laetitia Genin, coordinatrice nationale de Vie Féminine, cette loi représente un signal fort, nécessaire mais insuffisant : il faudrait davantage informer de son existence, faciliter ses conditions de mise en application (accueil de la plainte, par exemple) et encourager plus vivement son utilisation.

 

Au-delà de l’objectivation bienvenue du phénomène, Vie Féminine insiste sur l’importance d’un véritable travail articulé, qui s’attarde à la fois sur l’éducation des filles et garçons, sur l’accueil et l’accompagnement respectueux des victimes, sur les outils juridiques favorables aux femmes et sur leur visibilité.

Le rapport complet sera disponible début octobre et Vie Féminine propose également de poursuivre le travail mené le 24/10, à Charleroi, avec un workshop sur le sexisme dans l’espace public.

 

Le public était présent en nombre dans la belle brasserie carolo de l’Eden. Outre le secteur associatif, on notait la présence de responsables politiques, de journalistes, de membres des secteurs de la police et de la justice, des participantes à l’enquête, des membres d’organisations syndicales, etc. Un beau succès, bien relayé dans les médias.

Nous avons comptabilisé 79 personnes présentes dans la salle, 65 femmes et 14 hommes. Fait amusant pour l’anecdote : sur les 17 interventions du public, 7 hommes ont pris la parole. Un pourcentage de présence de 17,7% pour ensuite passer à un taux de prise de parole de 41,2%. Un autre phénomène qui illustre toujours – sans juger aucunement la qualité de interventions de ces messieurs, que du contraire – une forme de déséquilibre au sein du débat public…

 

EDIT : l’étude finale est désormais publiée et disponible ici.

 

Baptiste Dethier

 

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